
Vaincre son aquaphobie : témoignage
À l’âge de 4 ans, j’ai failli me noyer à la plage du Havre. Il a suffit d’un moment d’inattention de mes parents. Je m’avance vers l’eau. Je pense pouvoir marcher dans l’eau comme sur terre. Je m’avance encore plus profondément… Et je me souviens de cette sensation « machine à laver », de l’eau salée qui envahit ma bouche, mon nez, de cette femme qui me sort de l’eau et m’amène au poste de secours.
Un traumatisme est né. J’ai peur de la mer. J’ai peur de mettre la tête sous l’eau. J’ai peur car je ne maitrise pas l’eau. J’ai peur car je ne comprends pas cet élément qui a failli m’emporter.
Comment surmonter cette peur ? Comment effacer ce traumatisme et apprécier enfin les moments passés à la mer ou à la piscine. Surtout, j’en ai assez d’entendre « les Noirs ne savent pas nager ». Je veux briser ce cliché !
Je me laisse une année. Une année pour surmonter ma peur. L’examen final sera… la grande barrière de corail dans le nord de l’Australie. Il faut passer tout de suite à l’action.
Je prends donc des cours de natation intensifs en piscine (pendant deux semaines, tous les matins, du lundi au vendredi, de 7h30 à 8h30). Puis je poursuis à un rythme d’un cours de 30 minutes par semaine. J’ai adoré les premiers exercices. L’instructeur m’a proposé de me mettre sur le dos dans la piscine. J’ai refusé. Il m’a alors demandé ce qui me faisait peur dans cet exercice. Je lui ai répondu que j’avais peur de couler et de ne pas réussir à me relever, et surtout de boire la tasse. Il m’a alors dit : « Tu as pied, et je suis à côté, il ne peut rien t’arriver. Fais ce qui te fait peur et vois ce qui se passe. Mets-toi sur le dos et laisse aller ton corps ». J’ai fait cet exercice plusieurs fois. La première fois, je panique. Les fois suivantes, j’arrive à observer ce qui se passe, à contempler cette matière m’envelopper et me soulever jusqu’à la surface. Je découvre la flottaison.
À la mer, j’ai commencé par les bases, comme un enfant. Je joue avec les vagues. Je saute dans les vagues. Je vais de plus en plus loin et me laisse emporter par l’eau. Je commence à apprécier ma présence dans l’eau. J’enchaine avec un masque et tuba, en restant bien entendu là où j’ai pied. J’observe les poissons, je ramasse des coquillages. Je fais également de la pêche (poissons mais également palourdes). Tous ces exercices permettent de sa familiariser avec l’eau et de comprendre comment l’être humain fonctionne dans un autre élément que sur la terre. La pêche, le bateau, sont en quelque sorte une entrée en matière, une éducation aux milieux marins. En attendant l’examen final…
Ce jour J d’août 2015 à Cairns (Queensland, nord de l’Australie) restera gravé dans ma mémoire. Ce jour où j’ai pris le bateau, masque et tuba à la main. Ce jour où je me suis retrouvée en pleine mer à contempler, émerveillée, cette fameuse barrière de corail. Raies manta, poissons colorés, corail… Je ne formais qu’un avec l’océan.
Dans la même année, j’ai tenté la plongée en Indonésie. À 2 mètres, j’ai demandé à remonter. J’ai eu une crise de panique. C’est normal. J’ai brûlé les étapes et je suis allée trop vite. Mais je n’ai pas dit mon dernier mot !
L’aquaphobie c’est dans la tête, ça part, ça revient. Par moment je suis à mal à l’aise, paniquée. Dans d’autres cas, je me sens comme un poisson. Le principal est de continuer de pratiquer et de ne jamais laisser la peur gagner trop de terrain.
Allez, tous à l’eau !